LA TURISTA
Il mangea au restaurant de l’Amitié de Lomé un très bon poisson-frites. Au moment de partir, lorsqu’il se leva, il sentit sa tête lourde.
Avec du mal, il atteignit la porte. La chaussée se déroba sous ses pieds. Il titubait. Quelques passants lui jetèrent un mauvais regard. On ne comprenait pas qu’un Blanc se livre ainsi en spectacle. Bien sûr, tous imaginaient qu’il avait bu.
Sa tête lui faisait mal et sa vue se brouillait. Il parcourut quelques mètres avec beaucoup de difficultés. Cela ne s’arrangeait pas. Un haut-le-cœur le secoua. Dans un suprême hoquet, il vomit tout ce qu’il pouvait. Plusieurs passants, femmes ou hommes l’insultèrent. Des enfants se moquèrent de lui.
Les vomissements l’avaient soulagé quelque peu. En chamboulant, il rejoignit son hôtel. Le patron hocha la tête en lui tendant sa clé et lui conseilla de prendre une douche. Ce qu’il ne fit pas. Il se coucha dans la minute et, malgré la chaleur moite, il s’endormit. Au cours de la nuit, un tonitruant pet tâcha son drap.
Deux jours plus tard, il tenait sur ses pieds et se sentait prêt à profiter de ces mois de voyage. C’était comme si ce poisson-frites l’avait vacciné contre la Turista… la gastro-entérite des touristes.
(sur un texte de 1982)