Devant la Banco do Estado do Amazonas, Christian se dirigea vers le petit groupe.
- Alors Carlos, toujours en grève ?
- Ola Christian. Bien sûr ! Regarde notre belle banderole.
Tendue entre deux poteaux de signalisation, on pouvait lire : « Non, à la privatisation », « 30% d’augmentation ».
- Oh ! Oh ! (rigola Christian) ça prend de l’ampleur.
- Hier, on était vingt-cinq grévistes, aujourd’hui douze… C’est à cause d’eux, les gens ont peur…
Le lascar balafré les frôla presque en les dépassant sans même leur adresser un regard…
Carlos désignait la banque. A travers les vitrines, on voyait, outre les habituels gardes armés de pistolets et de matraques, une dizaine de flics de la PM, eux aussi armés. A intervalles réguliers, entre deux morceaux de musique, la voiture-sono scandait des slogans. La batterie de haut-parleurs sur le toit était impressionnante. Carlos désigna le speaker assis sur le capot :
- Il nous a dit que ça marchait mieux à Rio, São Paulo, Belo Horizonte… A la Banco do Brasil, ils réclamaient 40% d’augmentation, ils en ont obtenus 25%... On espère…
- Je vous souhaite de gagner. Mais, n’oublies pas que je dois recevoir mon virement la semaine prochaine (rigola Christian).
- T’inquiète. Rien que pour toi, j’ouvrirais mon guichet (répondit Carlos sur le même ton plaisantin).
- Ah ! C’était le bon temps lorsque je recevais des virements… (rêva Christian) Maintenant, la galère…
A quelques pas de là, devant une vitrine débordante d’appareils électroménagers, le lascar balafré discourait avec un gros moche, aussi baraqué, mais plus petit. A les voir ainsi, on pensait tout de suite que ces voyous préparaient un coup…
- Tu es toujours décidé pour… (demanda Carlos).
- J’ai pas le choix… (répondit sans conviction Christian).
- Tu ne devrais pas faire ça ! (grogna Carlos en faisant une moue de reproche).
- Bof… Ils ont assez duré ici…
- Ils sont comme chez eux. C’est pas bien Christian. Je ne te comprends pas.