Conseil de révision

Un baoué à Paris

C’est dans la salle de la Musique (derrière la Mairie de Château-Salins) que les jeunes hommes passaient leur conseil de révision. Nus comme des vers, ils s’alignaient devant une brochette d’hommes mûrs qui faisaient autorité en la matière. On examinait leurs attributs. On les déclarait bons pour le service militaire ou pas.
Pour l’occasion, un camelot s’installait à l’entrée de la Mairie. Chaque conscrit se faisait un honneur d’acheter des cocardes. Ainsi parés, les jeunes gens entreprenaient une virée dans Château.

C’est avec ces souvenirs en tête que notre Daniel se rendit faire ses « trois jours ». L’évènement avait lieu au château de Vincennes. C’est-à-dire à l’opposé d’Argenteuil, là où il habitait depuis deux ans. Signalons, que l’évènement se situe en 1969, un an après Mai 68. Un soleil radieux illuminait la sortie de la bouche de métro. En haut de l’escalier, un vendeur agitait de jolies cocardes bleu blanc rouge avec d’aussi jolis rubans multicolores.

 

Sans s’en rendre compte, notre Daniel se retrouva projeté à plus de trois cents kilomètres de là. Il voyait ses aînés mâles se rendre à la mairie… Il allait se mettre à poil devant un jury et un médecin. Autorités civiles et militaires allaient décider s’il était apte ou pas. Notre Daniel revoyait ses aînés bardés de cocardes et de chapeaux sillonner les rues de Château en chantant, embrassant les filles qui ne s’effarouchaient pas. Il les voyait entrer dans les cafés, faire une fête du tonnerre...
Il ouvrit son portefeuille, en sortit quelques billets et se paya les plus belles cocardes. Ainsi paré et prêt à fêter l’événement, notre Daniel se présenta à l’entrée de la caserne. Il allait passer « trois jours » dans la bonne humeur et l’allégresse.

La cour était agitée de jeunes, chevelus pour la plupart. Le Daniel l’était aussi. Beaucoup portait des jeans et des tenues négligées, pas notre Daniel… Il ne lui fallut guère de temps pour s’apercevoir qu’il était le seul baoué à être affublé de la sorte. Plus vite que l’éclair, il arracha ses cocardes et les enfouit au fin fond de ses poches...

 

Un an plus tard, c’était le service militaire. Ainsi prenait fin de la période dite « Château »…

 

 

Une autre version

 

 

Un saut de lapin
(texte à la fin de la page)

 

Date de dernière mise à jour : 04/01/2024

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