V’là le Jules

 

Dans la nuit de mercredi à jeudi régnait une forte animation. Penses voir, le François était aux cent coups. C’était bien simple, il ne savait plus où donner de la tête. Heureusement, son jeune frère Claude arrivait :
- Va chercher la Magdeleine !
- La Christine a le mal d’enfant ?
- Va chercher la Magdeleine ! s'énerva le François.
- Une fille ou un garçon ?
- Dépêche-toi ! le rabroua le François.

 

Déjà, il s’affairait. Faire chauffer l’eau dans la lessiveuse, préparer les linges…
-  Ousqu'y sont ! Ousqu'y sont ! pestait-il tout seul.
La Christine prit le temps de plaisanter :
- Oh ! Le Françoué, te perds la tête, deun ? R’garde voir dans la grande armoire. Tout est rangé. Te le sais bien.

 

Le François eut juste le temps de se retourner que son frère réapparaissait, la Magdeleine sur ses talons. La vieille femme reprit son souffle avant de lancer :
- Ah ! Te fais moins le fier qu’y a neuf moués !
Un grognement lui répondit. Elle reprit :
- Va deun boire une mirabelle, le Françoué. Ça t’remettra.
- Préférerais être près d’ma Christine.
- Te la gênerais plutôt qu’autre chose. Allez, va à la cuisine.
Ce n’est pas un verre que le François avala… Son frère Claude essayait de le rassurer comme il pouvait :
- Elle a de l’expérience… Pense voir, soixante ans… La Magdeleine, elle en a vu…
Aux premiers cris du nouveau né, il se précipita… Son frère l’arrêta :
- Les femmes n’aiment pas qu’on voit ça.

 

Le François trépignait devant la porte… qui finit par s’ouvrir. La Magdeleine brandissait le bébé :
- C’est un waré ! Un futur bonnetier comme son père.
Histoire de fêter la naissance, la Magdeleine s’enfila un verre de mirabelle.
- Alors, comment qu’on l’appelle ce piat ?
- Jules !
- Très bien ! Allez le nonôn, sers nous deun un autre verre avant que je r’tourne à mon lit. C’est presque quat’heures.
- Déjà ! s’écria le Claude qui n’avait guère vu l’aiguille de la grosse horloge tourner.
Et s’adressant au François qui ne s’était pas encore remit d’être papa, la sage-femme lança :
- Laisse deun ta Christine se reposer ! Et n ‘oublies pas d’main d’aller déclarer ton piat à la Mairie. Nème !

 

Le quatre mars de l’an mil huit cent dix neuf, le François était tout fier. Son petit Jules bien emballé dans une couverture, il se rendit en Mairie. A quatre heures après-midi : « Pardevant nous Jean François HAINGLAISE, maire… ». Ainsi, le François fit enregistrer la naissance de son premier bébé. Bien sûr qu’il était « de lui » et de sa Christine. Il en avait de ces questions M’sieu le Maire ! Son prénom ?
- Jules ! qu’il répondit sans hésiter.
- Et ton nom, on l’écrit toujours Dégres ?
- Aïe !
- Et tu signes toujours Dégré ! rigola le Maire.
Le Sieur Christophe Noirjean l’accompagnait. Mais, il fallait deux témoins.
- J’savais pas…
- Pas grave, que lui répondit le Maire. Notre secrétaire fera l’affaire.
Et père et témoins signèrent avec le Maire les deux registres, après qu’il leur en eut été donné lecture de ce qui venait d’être consigné.

le 30 janvier 2008

 

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Date de dernière mise à jour : 18/07/2024

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