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Le sac d’écus

Humour

- R'garde la Sabine, ce que j’â trouvé dans la forêt, dit le Daniel en posant sur la table un petit sac bruissant.
La Sabine ouvrit la bourse. Il s’en déversa – mes amis ! – une cascade de beaux écus tous neufs, tous brillants comme des soleils.
« Dans la forêt, pensa la Sabine, c’est sûrement le nouveau Directeur du Continent qui a perdu l’argent-là. Peuh, un homme si dur avec le pauvre monde qui travaille pour lui ! …Les sous-là seront ma foi mieux dans ma goyote que dans la sienne ! ». Elle fit aussitôt main basse sur les écus.

 

Une idée la chapouillait. Elle se disait : « Le Daniel, l’innocent-là, saura jamais tenir sa langue. Quèce allons donc' faire ? »
Et comme elle avait de l’entendement pour deux, elle commanda :
- Le Daniel, va-t-en voir dehors si le temps tourne pas à la pluie.

 

L’homme montrait à peine ses talons qu’elle s’enferma dans la caravane. On l’entendit feûgner un bon moment. Elle cachait les pièces dans un endroit où, mes pauv’ gens, vous n’irez pas jamais les chercher… Puis dans le placard, elle prit une boîte de pâtes. Elle ouvrit une des fenêtres de la caravane et jeta de pleines poignées par-dessus le auvent.
Les pâtes tombèrent autour du Daniel comme une grêle d’avril. Bien étonné, l’homme n’en parla pas et prétendit qu’il ne pleuvrait point aujourd’hui. Chose très curieuse chez lui, il partit aux douches. En vérité, il ne voulait nullement se laver, mais il avait grand besoin de s’éclaircir les idées.

 

En un tour de main, la Sabine attrapa la Fofa et enferma la chienne dans l'Express. Puis, elle plaça trois beaux œufs bien en évidence à côté de Fofa. Lorsque le Daniel revint des douches :
- Mon pauv’ Daniel, fit-elle sur un ton pleureur. Not' Fofa a fait la peûte toute la matinée. L’est sûrement malade. Aussi, j’âs crû bon de l’enfermer dans l'Express. Va donc' voir ce qu’elle fait à c't'heure !
Le Daniel se hâta vers l'Express, ouvrit la porte. Aussitôt la Fofa pensa que le Daniel allait l’emmener en promenade. Elle sauta de l’automobile toute joyeuse et tournoya autour de l’homme en jappant. Et voilà que le Daniel, bien étonné, découvrit sur le siège trois beaux œufs.

 

Pendant les jours qui suivirent, le Directeur du Continent cherchait partout son sac d’écus. Il questionnait à droite, se renseignait à gauche et finit par aviser la maréchaussée. En effet, quelqu’un avait vu le Daniel trôyer dans la forêt. Aussi, un beau matin, deux gendarmes arrêtèrent leur 4L bleue devant le portail.
- Holà du logis !
Le Daniel accourut.
- Dîtes voir l’homme, questionna l’un des gendarmes, vous n’auriez pas des fois ramassé un sac d’écus dans la forêt ?
- Si fait, M'sieus les gendarmes, si fait ! C’était le jour où il pleuvait des pâtes et où not' chienne Fofa a pondu trois œufs.
Les gendarmes s’entre-regardèrent. « Un fou » lâcha l’un. Haussant les épaules, ils tournèrent brides sans insister et remontèrent dans leur 4L bleue.

 

Le 4 mars 1993

 

 

Inspiré par les Petits Contes des Campagnes Lorraines.

 

 

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Date de dernière mise à jour : 14/01/2025

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