« Düsseldorf, le 10 janvier 1892
« Ma petite Agathe chérie,
« C’est avec un peu de retard que je t’écris cette semaine, mais je ne t’ai pas oublié pour cela, je pense toujours à toi. Que le temps semble long, et la vie mauvaise, quand on est loin de ceux qu’on aime ! La belle vie commencera pour nous, que quand nous serons ensemble, réunis pour toujours !
« Et toi, penses-tu à moi ? Trouves-tu aussi le temps long ? Est-ce que tu as le cafard ? Si tu l’as, je suis sûr pas tant que moi, et en plus de cela il fait un temps de chien, ce qui me rend encore plus morose ! J’ai sommeil, et je m’endors presque sur la lettre, mais j’ai néanmoins, la volonté de réagir, car je pense à toi, et cela me donne du courage !
« J’ai changé la photo de place, la tienne. Elle est sur ma table de nuit, comme cela je m’endors en te regardant, et tu es ma bonne âme qui veille sur mon sommeil et qui peuple mes rêves, je voudrais que ce soit : Toi ! en chair et en os ! Enfin, pour l’instant, il faut que je me contente de cela.
« Je crois, que pour une fois, je t’en ai raconté, ma tête se vide, et je te quitte en t’envoyant mes plus doux et tendres baisers.
« Ton Karl qui pense bien à sa grande chérie. Surtout écris moi vite ».
La tante était devenue, plutôt était redevenue Française à l’âge de 52 ans. En 1940, comme bien d’autres et malgré ses 73 ans, elle préférera quitter sa maison et sa ville.
- T’voulais pas être Allemande, alors t’as pas marié le Karl, nème !
- Oh moi, tu sais Allemande ou Française, je m’en fichais.
- Bâ, pourquoi t’âs partie en Dordogne, alôre ?
- Tout le monde partait… Et puis en 40, c’était pas les mêmes Allemands.
- C’étaient les Boches ! (approuvai-je)
- On peut dire ça…