Le chef Urgences mit les écouteurs dans ses oreilles, me plaqua le micro dans le dos. Et ici… Et ici… Et ici… J’entends rien, finit-il par articuler. Tu es devenu sourd, le railla l’autre chef. Je n’entends rien, je te jure. Il mit le micro sur ma poitrine, rien ! Il trifouilla le flexible qui reliait le micro aux écouteurs. Tout paraissait normal. Tu es sourd ! rigola de plus belle le chef SAMU. Il remit les écouteurs, me plaqua le micro dans le dos. Rien. Il mit le micro sur sa poitrine et lâcha : moi, je suis vivant, j’entends. Un nouvel essai sur moi ne fut pas plus concluant. On verra ça plus tard, il n’est qu’à 85. Et les chefs animateurs partirent vaquer à d’autres tâches.
Tutt ! Tutt ! Régulièrement, l’animatrice ou l’animateur passait prendre de mes nouvelles. Souvent, ils remettaient en place la pince qu’ils m’avaient coincée au doigt. Ils avaient donc peur que je l’esquinte leur pince ? Ou alors que je leur vole ? Tutt ! Tutt ! Son dossier à la main, le chef Urgences vint me voir. Et il déroula la liste de mes allergies. Tutt ! Tutt ! Cette fois, ce fut le chef Urgences qui tripota la pince que j’avais au doigt. Et il répéta : allergies ? Il changeait de chanson, finis les nom, âge, etc.
Maintenant, il me bassinait avec ce mot qui devait, à n’en point douter, servir de laissez-passer pour accéder aux attractions. Sans le laisser paraître, j’égrenai la liste : poils de chats, poils de certains chiens, brouillard, poussières… Et aux aliments ? Ma parole, il avait dans l’idée de me priver des bonnes choses du réveillon. Non, mais ! Alors, je répondis fermement : à aucun aliment. Le chef SAMU intervint : les pompiers ont noté œufs de homard. Je n’y crois pas répondit le chef Urgences. Enfin, je ne suis pas allergologue. Pour moi, c’est une crise d’asthme provoquée par je ne sais quoi. Le chef SAMU en tira la conclusion : Pas de homard ! Du canard ! Pas de homard ! Du canard ! Et tout au long de la nuit, à intervalle régulier, il scandera : Pas de homard ! Du canard !