T’ai-je déjà parlé de notre rouge-gorge ? Chaque fois que nous allons dans le jardin, il nous tient compagnie. En fait, cette histoire d’oiseaux remonte à loin. Au temps où notre maman était toute petite.
Juste en face de la Sous-préfecture, un peu en-dessous de la maison où avaient vécu ses grands-parents Capet, se trouvait le Paradis des Oiseaux. Oh ! Il lui fallait un certain courage. Car, vois-tu, au rez-de-chaussée se terrait une sorcière. Toute vêtue de noir, les cheveux encore plus ébouriffés que ceux du Sotré, une peau ridée comme on ne l’imagine guère, un nez si crochu...
Dès que notre maman pénétrait dans le couloir, la sorcière jaillissait de sa tanière. Elle ricanait à en faire dangereusement graouilloutè le ventre de notre maman. La sorcière s’avançait, se penchait vers elle... tendait la joue... Notre maman devait l’embrasser. La joue ridée la rebutait, les poils ras la piquaient... A contrecœur, notre maman se soumettait. C’était une sorte de droit d'entrée.
Ouf ! Elle pouvait s’élancer dans le couloir, gravir les marches à toute vitesse. En haut, la porte ouvrait le Paradis. Une fée agitait son bâton magique. Autour d’elle ce n’était que scintillements de perruches... chatoiements de canaris... miroitements de colibris... Une envolée de moineaux forma un brouillard...
Dès qu’il aperçut notre maman, le rouge-gorge se précipita sur son épaule. Un perroquet cria : « Ôdette ! Ôdette ! ». Un vol d’hirondelles effleura sa tête... Une mésange bleue se posa sur son autre épaule et toqua. Aussitôt, notre maman fouilla dans ses poches et en sortit de délicieuses graines. Aussitôt moineaux, pinsons, linottes, bergeronnettes... J’arrête, je ne pourrais jamais les citer toutes et tous...
Les oiseaux mangeaient dans ses mains. C’était un continuel va-et-vient. Le claquement sec d’une cigogne réprimandait ceux qui, trop pressés, se bousculaient...
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