Le vieil homme et la Louise

Dieppe

Nous arrivions sur une agréable placette. Cette ville était vraiment jolie. Un vieux monsieur lisait une plaque vissée sur la façade d’une maison. Ma sœur l’interrogea :
- Y’a marqué quoi ?
- Ah, vous voilà les Mioches. Je vous attendais.
Le vieux monsieur était habillé d’une façon rigolote, pas du tout à la mode des années 1950 et encore moins à celles des années 2020. Il ressemblait aux grands-pères de nos grands-parents que nous avions vus en photos.
- T’savais qu’on v’nais ? (Le vieux monsieur sourit au lieu de nous répondre. Ma sœur reprit) Comment t’appelles ?
- Oh, vous le saurez bien assez tôt… Regardez (dit-il en lisant la plaque).
- C’est qui Louise Michel ?
Le vieux monsieur cherchait comment expliquer qui était cette femme…
- Vous vous souvenez de ce que vous racontait le Heurlin… (« T’connais le Heurlin ? », l’interrompit ma sœur, mais le vieux monsieur poursuivit) … sur Rosa Luxemburg ?
- Elle voulait changer le monde ! Qu’y ait p’us d’bourgeois !
- Et que les ouvriers et les pauvres soient p’us pauvres (complétai-je).
- Eh bien (reprit le vieux monsieur le visage rayonnant) Louise Michel, c’est la Rosa Luxemburg des Français.
- Elle a fait la Révolution comme Rosa ! (conclut ma sœur).

Rosa Luxemburg avait participé à la Révolution allemande, qu’on appelait Spartakiste. C’était en 1918-1919. La Révolution avait été écrasée par les bourgeois allemands. Des milliers de Spartakistes avaient été assassinés. Rosa faisait parmi d’eux.
Louise Michel avait participé à la Révolution française, qu’on appelait Commune. C’était en 1871. La Commune avait été écrasée par les bourgeois français. Des milliers de Communards avaient été assassinés. D’autres milliers avaient été exilés en Nouvelle Calédonie. Louise faisait partie de ces derniers. Lorsqu’elle rentra d’exil, elle avait débarqué ici même, à Dieppe. Chaque année, les gens qui continuaient son combat se réunissaient sur cette placette.
- C’est pour ça qu’est écrit (conclut ma sœur en montrant la plaque) Te connais Louise Michel ?
- Un peu. Je l’ai rencontré en 1899. J’admirais son combat…

Voilà, l’histoire de Louise Michel était ficelée. Notre but principal arriva sur le tapis :
- T’sais ousque c’est la mer ?
- P’têt ben qu'oui, p’têt ben qu'non...
- Allez dis ousqu’est la mer !
Le vieux monsieur finit par nous l’indiquer. Il suffisait de suivre cette rue et, plus loin, de tourner à gauche. La petite rue aussi calme que les précédentes menait à la mer. Déjà, nous apercevions les mâts des bateaux. Ne restait plus qu’à traverser cette artère aux larges trottoirs.
- C’est ça la mer ? (nous exclamâmes complètement désappointés).
Devant nous…