Terre !

Le Rupt des Salmuires (Nos Légendes)

 

Nordkapp (le Cap Nord)

Le point le plus au Nord de l'Europe
(Laponie norvégienne)
(vue vers les terres)
(photo de 1980)

Des centaines, des milliers, des millions, des milliards de points scintillaient autour de nous. Oh ! Les jolies étoiles, s’extasia ma sœur. Les étoiles s’organisaient en galaxies. J’étais bien en peine de m’y retrouver. La Grande Ourse ! s’écria ma sœur en frappant dans ses mains. C’est que notre papâ lui avait déjà présenté le ciel, elle me nomma quelques galaxies. Le Soleil ! se réjouit ma sœur. Pour de sûr, elle n’était pas la plus grosse des étoiles. Au large du Soleil, pas trop éloigné, pas trop près non plus, la Bianche-tète s’amusait avec un nuage de poussière. Le nuage rebondissait, s’étirait, se concentrait, s’élargissait. La Terre !.
Comment ma sœur avait-elle reconnut notre planète ? Je ne saurais te le dire. Ce qu’elle me montrait, entre les mains de la Bianche-tète, n’était qu’une boule de poussière et de gaz bien semblable aux autres. Face à cet infini qu’était le ciel, elle était bien riquiqui. Trois fois rien. J’exagère parce que trois fois rien, c’est encore bien trop grand.
La Bianche-tète riait aux larmes. Elle nous invita à prendre place dans la boule. Nous nous mîmes à tourbillonner. Nous en avions le tournis. Le manège des Kiener, c’était de la gnognotte à côté de ce que nous vivions. Une matière pâteuse formait le noyau sans cesse en mouvement. Il régnait une de ces chaleurs. Hou, insupportable ! Nous devions décamper sous peine de nous liquéfier. La Bianche-tète veillait, heureusement : Laissez-vous porter par ces substances constituées d’atomes légers. Ça jette lorsqu’on utilise des mots ou des expressions qui font savant, nème ? Ça fait sensément comme si on était un puits de science. Heureusement pour moi, je ne t’ai pas invité pour me tirer l’oreille lorsque je dérape… Quoique tes réflexions seront toujours les bienvenues.

 

Attention ! cria La Bianche-tète. Les fortes pressions solidifient les matières. Nous nous accrochâmes au silicium. A moins qu’il ne s’agisse de sodium ou d’aluminium… Le courant en fusion filait vers l’extérieur, traversait le manteau. Notre irruption à la surface éclata en un exquis geyser. La matière retomba, nous avec. La Bianche-tète nous rattrapa juste à temps. C’est que la matière se solidifiait, devenait roche, formait une croûte. La Bianche-tète nous prit par la main et nous entraîna dans l’exploration. Ici des régions plates que l’on pourrait appelé plaines ou plateaux. Le Plateau Lorrain ? Là, de gros boursouflements que l’on pourrait appeler montagnes. Les Vosges ? Là, des creux que l’on pourrait appeler cuvettes. Notre cuvette, celle où s’installera notre ville ?
La Bianche-tète partit d’un rire à faire trembler la Terre. Le grondement s’amplifia à tel point qu’il nous cloua le bec. Les roches pestaient, grognaient. Nous les sentions bouger. Toutes voulaient participer à cette merveilleuse aventure. Ça tremblait sous nos pieds. De nouvelles roches voulaient voir le jour. Voilà ! Nous basculâmes. Le manteau nous engloutit. Autour de nous, des roches fondaient, devenaient visqueuses. De nouvelles matières s’aggloméraient…
Un courant en fusion nous catapulta à la surface. Le joli geyser s’éleva dans le ciel. Retombées, les matières refroidissaient et formaient de… nouvelles roches, de nouveaux paysages. Ainsi, évoluait la croûte terrestre. Un nouveau Plateau Lorrain naquit. De nouvelles Vosges s’élevèrent.

 

Qu’est-ce donc que cela ? Ça arrivait à une de ces vitesses. Boum ! Un peu plus et on se prenait la météorite sur la binette. Et, maintenant, nous ne voyions plus rien tellement il y avait de poussière. Nouvelles poussières, nouvel amalgame, nouvelle métamorphose des roches… La croûte terrestre n’en finissait pas d’évoluer. La météorite avait creusé une bien belle cuvette. Une cuvette comme celle qui abrite notre ville. La Bianche-tète partit d’un rire si grondant qu’un geyser surgit sous nos pieds. L’éruption volcanique nous projeta dans l’atmosphère. La planète était suffisamment grande pour provoquer le phénomène de l’apesanteur. Si elle avait été trop petite, elle n’aurait pu retenir l’atmosphère et nous nous serions égarés dans l’espace. N’en parlons pas
Gaz carbonique, méthane, vapeur d’eau. Acide chlorhydrique, acide sulfurique, etc. Quelle atmosphère ! Notre planète n’est pas la seule dans ce cas. L’Univers est tellement vaste. A des années lumières, le même phénomène s’était déjà produit, se produisait ou se produirait. La Bianche-tète nous l’a bien dit. On se demande ousqu’elle va chercher tout ça. Pense voir, la Bianche-tète arrange à sa sauce de la pure vérité. Allez vâ, elle n’est point de rigueur scientifique. Du moment qu’elle t’amuse sans te raconter trop de fariboles.
Il régnait une de ces chaleurs ! Chaleur dégagée par la Terre. Chaleur venue du Soleil. Le gaz carbonique laissait la chaleur solaire pénétrer l’atmosphère. Mais, parce qu’il était en trop grande quantité, il l’empêchait de se disperser. C’est ce qu’on appelle l’effet de serre. Franchement, au centre comme en surface, cette planète ocre rouge n’était pas bonne à vivre. Sans la magie de la Bianche-tète, nous aurions clamsé depuis longtemps.

 

Un éclair frappa l’endroit où nous nous trouvions. Le tonnerre fut si assourdissant que nous plaquâmes les mains sur nos oreilles. D’un coup, d’un seul, la chaleur exécrable nous propulsa dans l’atmosphère. Nous devînmes vapeur d’eau. Pas le temps d’apprécier le bonheur de planer. Pas le temps de réfléchir. La pression atmosphérique trop forte nous liquéfia. Nous dégringolâmes en pluies torrentielles. Un vrai déluge….
La chaleur excessive des roches nous saisit, nous évapora. Propulsés dans l’atmosphère ocre rouge, nous retombâmes… aussi sec, si je puis dire. Et avec une de ces rapidités ! Et nous recommençâmes… Le déluge, je te dis ! Hé ! Minute… s’écria la Bianche-tète. Regardez autour de vous. Dans cette atmosphère ocre rouge, nous n’étions pas seuls. Emparez-vous d’eux ! ordonna-t-elle. J’eus juste le temps de rafler quelques acides. Ma sœur s’appropria du gaz carbonique. Au tour suivant, nous réussîmes à nous emparer d’acides et de gaz en même temps. Et nous retombâmes. Le déluge ! Nous étions devenus tellement corrosifs que les roches en souffrirent. Ce qui provoqua de la poussière. Poussière qui s’amalgama… et forma de nouvelles roches. Atomes de fer, de zinc, de cuivre, de cobalt, de manganèse, de calcium, de magnésium, de vanadium, les roches s’enrichissaient. Tu vois, la Bianche-tète ne nous avait pas métamorphosés sans raison. Déjà, nous étions évaporés.
Ma sœur en eut, la première, l’idée. Fallait tout le temps qu’elle mêle son grain de sel. Elle propulsa de la matière contre des gaz. Miracle ! Une molécule venait de naître. La température pas trop excessive permit à cette molécule de rester stable. Inlassablement, nous transformions matière et gaz en molécules. Inlassablement, les ultraviolets du Soleil les détruisaient. A peine nées, déjà mortes.
Évaporation – condensation – pluie abondante…
Molécules – ultraviolets – destructions…
Évaporation – condensation – châwaye…
Molécules – ultraviolets – destructions…
La Bianche-tète nous montra l’horloge de la Terre, elle indiquait le demi milliard d’années.

 

Enfin, le déluge arrivait à ses fins. L’eau s’était lovée dans les parties basses. La Terre en était devenue bleu. Aussitôt, nous plongeâmes dans les flots. Les courants nous entraînèrent dans des farandoles interminables. Ici, ils nous poussaient dans les bas-fonds. Là, ils nous propulsaient à la surface. Ce nouveau jeu nous séduisit immédiatement. Il y avait bien, ici ou là, quelques volcans qui nous contrariaient. Quoique, ils agrémentaient notre jeu. Et de ces tempêtes ! De quoi nous soulever le cœur à en faire dégobiller.
Les flots s’étendaient. Des sédiments d’origine chimique ou volcanique se déposaient. Dans le même temps, la quantité de gaz carbonique diminuait et rendait l’atmosphère plus perméable. La chaleur se dispersa, s’échappa. L’effet de serre s’atténuait. La pression atmosphérique baissa. Mais oui, évaporons-nous, laissons-nous aspirer vers les altitudes. Condensons-nous en nuage. Laissons les vents nous pousser. Et les molécules ? cria la Bianche-tète. N’oublions pas nos molécules ! Nous avions tellement passés de temps à les fabriquer. Les molécules tombaient… sur les roches nues ? Les ultraviolets les détruisaient. Les molécules tombaient… dans les flots ?
Un immense volcan éteint attira notre attention. Notre cuvette originelle. Celle de chez nous ! s’écria ma sœur. Allons-y ! Nous profitâmes de la pluie pour plonger. Dans la cuvette remplie d’eau au raz bord, d’autres molécules tombaient. Et encore d’autres. Elles voltigeaient comme des flocons de neige. Nous accompagnâmes leur ballet vers les bas-fonds. Elles s’y accumulaient et semblaient se régaler. L’eau les protégeait des ultraviolets solaires. Les molécules formaient la « soupe primitive » comme disent nos savants.
Glucide, lipide, acide animé ou acide nucléique ? Peu importe. Ma sœur s’empara d’une série de molécules et fabriqua une cellule. Elle est géniale, ma sœur, nème ? Ainsi, elle engendra des cellules et encore des cellules. Je l’imitai. La Bianche-tète nous encourageait en frappant dans les mains. Elle nous désigna l’horloge de la Terre qui annonçait le milliard d’années.
Les cellules étaient aquatiques et microscopiques. Voilà qu’elles dévoraient la matière organique. De simples cellules, elles évoluèrent en végétal. La Bianche-tète les baptisa du joli nom Algues Bleues. Oh ! Ces algues étaient bien microscopiques et elles n’étaient composées que d’une seule cellule. Totalement immergées, elles absorbaient l’eau. T’affoles pas, elles n’allaient pas tout picoler. C’est comme qui dirait pas possible. Et puis, elles absorbaient également les sels minéraux et le gaz carbonique.

 

La soupe primitive s’appauvrissait dangereusement. Ces Algues Bleues étaient bien malignes, vâ ! Grâce à la chlorophylle, elles transformèrent cette eau et ce gaz ingurgités en sucre. En glucose, si tu préfères. La « photosynthèse » préciseraient nos savants. Dorénavant, sans cesse renouvelée, la matière organique ne risquait plus de s’épuiser et l’avenir de la Vie s’en trouvait plein d’espoir… à condition que les Algues puissent se reproduire. La Bianche-tète nous posait un nouveau problème…
Il suffisait que des cellules reproductrices mâles rencontrassent des cellules reproductrices femelles et les fécondassent. C’est papâ et môman ! exulta ma sœur. La Bianche-tète éclata de rire et nous encouragea. Ce fut notre nouveau jeu. Nous prîmes une poignée de cellules et les semâmes dans les flots. Le tour était joué, une nouvelle Algue Bleue naissait. Et encore une autre… Ma sœur était bien plus habile que moi. Bien souvent, mes cellules rataient leur cible. Arrête ton ironie ! Je sais bien que les mâles sont maladroits… Je recommençais maintes et maintes fois. Ma sœur ne s’en lassait pas. Si bien que les bas-fonds de notre cuvette se couvrirent d’Algues Bleues. Les Algues produisirent de l’oxygène en grande quantité. L’oxygène se répandit dans les flots bleus. Un peu au Nord-ouest de notre cuvette, nous fîmes une nouvelle plongée. A cet endroit, l’oxygène était à pied d’œuvre. Elle oxydait tout ce qui pouvait l’être. C’est ainsi que des milliards d’oxyde de fer se déposaient au fond. Ils constitueront plus tard les gisements de minette. A cet endroit : Hayônche, nous informa la Bianche-tète. Hayônche ? Pourquoi pas, si la Bianche-tète l’affirmait. Nous n’allions pas la contrarier. Quoique, nous savions bien que la région de nos petits-cousins ne ressemblait en rien à ce qui s’étendait sous nos yeux. Tu me diras : Ta cuvette, tu crois qu’elle ressemble à ce que tu connais ?. Et tu auras bien raison, car la Terre était en perpétuel changement vu que nous traversions son histoire à coups de millions d’années.

 

Nous remontâmes. L’oxygène avait colonisé les flots. Voilà qu’elle s’en échappait. Voilà qu’elle s’infiltrait dans l’atmosphère. Le chaud soleil nous évapora. A nouveau, les vents nous portèrent. Nous errâmes de longs moments. Partout, l’oxygène s’imposait.
Mais, les ultraviolets bombardaient impitoyablement. Si bien que dans les parties hautes de l’atmosphère, les ultraviolets transformèrent l’oxygène en ozone. Ah ! Miracle. Sous cette couche d’ozone, les ultraviolets n’avaient quasiment plus d’effet. L’ozone les filtrait. En refusant le passage aux ultraviolets, l’atmosphère devenait la complice de la Vie. L’ozone allait permettre à nos chères Algues bleues de sortir de l’eau et de coloniser la Terre.
Et, puis, brin de nostalgie oblige, nous voulûmes retrouver notre cuvette. Pas moyen d’mamayer ! C'était tout simplement impossible, elle avait disparu. Plaçons des grains de sel à cet endroit. Laissons notre colère éclater en un faramineux orage. Précipitons-nous dans les flots bleus. Des bactéries, des molécules. Et, les flots bleus contenaient des grains de sel… dissous. Bref, l’eau était salée.
Un de nos jeux favoris consistait à onduler sur les flots bleus. Grâce aux vents atmosphériques, nous nous élancions en vagues, parfois rageuses. Nous voltigions en écume blanche.
Plus amusant encore, la chaleur nous transformait en vapeur d’eau, nous aspirait. Alors, nous grimpions dans le ciel. Ça faisait drôle de ne plus sentir les grains de sel. C’est qu’ils étaient bien trop lourds pour nous accompagner. Allez vâ, nous les retrouverions plus tard. Continuons de grimper jusqu’à temps que la fraîcheur nous condense en gouttelettes. Alors, sous l’apparence d’un joli nuage, nous voyageons autour du globe. Un changement de température, la vapeur se regroupait en gouttes et nous tombons en pluie. Parfois, le froid nous cristallisait en flocons de neige, voire en grêle. Et nous retrouvions les grains de sel dans les flots bleus.

 
 

Le Rupt des Salmuires

Sa source gazouille toujours sur le coteau de Milo



 

La Bianche-tète
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Date de dernière mise à jour : 04/09/2024

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