- T’vâs à la messe ? (demanda ma sœur à la hauteur d’une église).
Vu la moue que Charles afficha, on en déduisit que ce n’était pas sa tasse de thé. S’il ne répondit pas à ma sœur, c’était tout simplement parce qu’il ne voulait pas la froisser.
- Moi, j’vâs quand i’a une fête. Comme la Pâques (pavoisa-t-elle).
- Moi (me distançai-je) j’âs allé une fois. Mais, comme je parlais tout le temps, la môman, elle a dit : « C’est la première et dernière fois qu’on l’emmène. Tout le monde nous regardait ».
- Te fais des discours des fois ? Déjà monter là ?
Charles regarda ma sœur en fronçant les sourcils au point d’en rider son front. Il se demandait où elle voulait en venir. Nous lui racontâmes certaines de nos discussions avec le Heurlin. Lui ne prenait pas de gants pour vilipender les curés et leur religion.
- « A coups de balai qu’on les chassera, les bons’ômes en robe ! » (cria ma sœur) I dit ça le Heurlin (elle désigna la chaire) Le Heurlin quand il ira à l’église, ce s’ra pour monter là.
- Pour quoi faire ?
- Comme le bon’ôme en robe, pardi ! Mais, lui, il causera de la Révolution. C’est ce qu’i a dit. La Révolution ! (Son cri résonna dans toute l’église. Le peu de monde qui visitait l’édifice la regarda effaré) Te vois, ça résonne bien (Elle mit les mains sur ses hanches, afficha une moue qui se voulait convaincante) C’est bien pour faire un discours, nème ?
Charles regarda la chaire avec intérêt, je dirais même avec un nouvel intérêt. Sans doute s’imaginait-il monter l’escalier, prendre appui sur la rambarde et haranguer la foule. Mais, voilà, ce n’était pas la Révolution, l’église et sa chaire restaient la chasse gardée des curés.