Le Fanfan enquête

(Le Marché // Le Vélo)

 
 
 

Légumes et fruits pesés, leurs prix alignés sur la page de son cahier, le Totol calculait l’addition. L’arrivée des Mioches et de leur maman le distrait quelque peu. Madame Bolinjé, sa cliente, et l’Oda s’embrassèrent. Et voilà que madame Bolinjé tapota la tête des Mioches comme le faisait les paysans au marché à bestiaux qui tapotaient la tête de toutes les vaches qu’ils croisaient. Le Totol ne put se retenir d’en rire. Imaginant sans doute qu’elle était ébouriffée, l’Oda passa la main sur sa tête.
- Alors, les Mioches, ça va ? (demanda le Totol).
- Ça peut aller (répondit la gamine) Tu vois, on s’est habillé léger passque il fait chaud.
- La môman, elle a mit nos gilets dans son sac (rajouta son petit frère) Comme ça si y’a des nuages.
- Elle a rudement bien fait vot’ môman (la Mikète montrait du doigt un casier) Qu’est-ce te veux ?
- C’est des cerises, ça ?
- Oui, t’en veux ?
Sans attendre la réponse, le Totol prit une poignée et lui tendit. Une autre poignée atterrit dans les mains de son frère.
- J’en veux plusse ! (réclama la Mikète).
- Mange déjà celles-là, on verra après.
- Oh ! Tu comprends rien. C’est pour la tante Agathe. Passqu’elle veut des cerises.
- Bon, bon, viens les peser…
Comme à leur habitude, les Mioches passèrent de l’autre côté de l’étal.

 

Pour l’heure, le Totol s’intéressait à la conversation entre madame Bolinjé et l’Oda.
- Ç’at arrivé la même chose chez nous (dit-il) On a volé un vélo et on l’a déposé à la gare.
- C’est pas possible !
- Si, si, je vous assure (répondit le Totol qui avait pris la réflexion de l’Oda au premier degré).
- Moi aussi, je veux peser les cerises (revendiqua le Dabo).
- T’es trop piat, t’sauras pas ! (rejeta sa sœur).
- C’est toujours toi qui fais la marchande…
- Passque je suis grande.
- La tante Agathe, elle a dit que tu devais m’apprendre.
Une cerise dans le bec, la Mikète s’empara des commandes de la balance. Et elle puisa des cerises. En râlant, le gamin s’attaqua à la pile de cageots vides et les rangea soigneusement dans le fourgon.

 

- Si ça se trouve, c’est le même. Et il a cassé la vitrine ? (demanda madame Bolinjé au Totol) Chez nous c’est ce qu’il a fait. Nème Oda, c’est bien ça ? (L’Oda afficha une mine dubitative) J’ai entendu dire qu’il avait renversé quelqu’un en se sauvant.
- On raconte beaucoup de choses. On m’a même dit que le Fanfan s’était fait renversé… Mais la Lolote l’a vu entrer dans la mairie avec son vélo.
- Moi aussi, je l’ai vu (confirma madame Bolinjé) Il est passé devant mon magasin. Il allait vers la mairie. Il m’a même crié bonjour.
- Doucement, t’vâs les abîmer (modéra le Totol).
- J’suis trop piate, j’arrive pas à bien les attraper.
- Vous savez (intervint le Totol tout en retournant une caisse vide et invitant la Mikète à grimper dessus) Les gens aiment bien raconter des histoires.
- A mon avis (avança madame Bolinjé) le Jano s’est fait volé un neuf vélo et le Fanfan enquête sur le vol. C’est pas plus difficile que ça.
- T’as raison (l’approuva l’Oda).
Bientôt, le plateau de la balance fut rempli de cerises. D’un coup, la Mikète vida son contenu dans le casier, un peu trop vivement.
- Hé ! Quèce te fais ?
- Le pépère ramène des cerises à la tante Agathe. Me rappelais p’us.
- Va doucement, c’est fragile les fruits. Après ta môman dira que j’lui vends des fruits talés.
- Et je pèse quoi, maintenant ! (râla la Mikète).
- C’est à moi !
Le Dabo avait fini de ranger les cageots vides dans le fourgon. Plusieurs fois, il avait essayé de sortir des cageots plein de légumes ou de fruits. Franchement, c’était trop lourd. Une fois, il avait même renversé un cageot de pommes.
- C’est à moi de peser ! (réclama-t-il à nouveau).
- Je pèse encore un truc et après je te laisse.
- Tu pèseras les abricots (trancha le marchand).
- C’est quoi les abricots ?
Le Totol désigna un casier, prit l’un des fruits et le donna au Dabo. Il était beau dans le genre jaune avec des parties presque rouge. Et il était délicieux.
- Moi, j’en ai déjà mangés chez la mémère (pavoisa la Mikète) Fais attention au noyau ! Si t’avales, te vâs tragnier (Elle mit ses mains sur les hanches et d’un ton revêche) Et moi, j’en ai pas ?
Elle remercia quand même le Totol et… râla :
- Et je pèse quoi !
- Vous voulez des carottes ? (demanda le Totol à l’Oda. Prise par sa discussion, l’Oda fit oui en hochant la tête. Il reprit à l’intention de la fillette) Allez pèse les carottes.

 

Une carotte, l’aiguille rouge bougea… Deux carottes, l’aiguille bougea de nouveau… La Mikète prenait plaisir à faire monter l’aiguille. Elle attrapait des carottes et les posait sur le plateau. L’aiguille avait dépassé la moitié du cadran. Le marchand aurait dit 620 grammes…
- Madame Chlodère, vous en voulez plusse ?
La maman était en grande discussion avec sa copine. C’est que madame Bolinjé avait une fille de l’âge de la Mikète. La gamine haussa le ton :
- Madame Chlodère, encore ?
- Oh, tu m’enquiquines, te vois bien que j’cause !
- Donne un peu d’air à ta maman (rigola le Totol).
Mais, de patience, la Mikète n’en avait guère. Elle continua son ouvrage en grognant :
- Bon, t’auras ça ! (Ainsi, elle atteignit ce que le marchand appelait « kilo », l’aiguille était bloquée) Regarde (dit-elle au marchand) faut mettre un poids passque l’aiguille, elle bouge p’us.
- C’est trop (protesta la maman tout en continuant à discuter).
Le marchand dit à l’Oda que cela amusait « la gosse » et qu’il enlèverait le surplus. La Mikète plaça le poids sur l’autre plateau et rajouta deux grosses carottes.
- Ça fait combien ? (demanda-t-elle au marchand qui était ravi).
- 1 kilo 165 !
- Encore madame ?
- Ça suffit…
- C’est bon, ça sera le bonus. Allez, à toi le Dabo. Prends les abricots et mets-les dans le plateau.

 

Le gamin grimpa sur la caisse. Hopla. C’était marrant ce jeu.
- Tu dois mettre un poids passque l’aiguille est bloquée.
Son frère l’ignora, il ajouta des abricots, et encore…
- T’en as mis d’trop ! (s’exclama la Mikète).
- Bâ, alôre ! Ça s’ra le bonus. Nème ?
Le marchand approuva, mais trouvant le bonus un peu trop important, il préleva cinq abricots. L’Oda avait fini son couârail. Elle commanda encore des courgettes, un concombre et un chou-fleur.
- Et eux, t’les pèses pas ? (protesta la gamine).
- J’les vends à l’unité…
- A l’unité ?
- Un par un, si tu préfères. Les cerises, les abricots, les aubergines, c’est au kilo. Les concombres et les choux-fleurs, c’est à l’unité.

 
 
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La Gazette des Fiawesmai 1954

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La Mikète 5 ans, le Dabo 2 ans 1/2, le Fofo 12 ans, l'Oda leur maman 28 ans, le Milou leur papa 28 ans,

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Date de dernière mise à jour : 06/05/2024

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