La chambre suivante était occupée par un collectionneur. C’est du moins ce que laissa entendre toutes ces bouteilles de bières alignées. Il serait bien fastidieux de les compter. Certaines n’étaient pas encore ouvertes. L’entrevue fut courte. A notre bonsoir, il ramassa une bouteille vide et fit semblant de la lancer dans notre direction. Il n’en fallut pas plus pour prendre les jambes à nos cous et nous carapéter au plus vite.
Yannick, puisqu’il s’appelait ainsi, avait guerroyé presque trois ans au Mali. A sa sortie de l’armée, il était revenu dans sa ville natale. Lorsqu’il s’était présenté au supermarché pour une place de vigile, ce fut le chef de la Sécurité qui le reçu. « On est des militaires, hein ! » s’était écrié le chef qui, lui, était un militaire en retraite. D’ailleurs lors de l’entrevue, ils ne discutèrent que de faits d’armes. Même pas un mois, Yannick fut promu responsable d’une équipe de vigiles. Pour Yannick, les vigiles n’étaient pas ses collègues, mais ses subordonnés qu’il menait à la baguette. Une troupe de Noirs et d’Arabes juste bons à exécuter les ordres.
Ah oui, il y avait ce Français qui courait vers la retraite et se fichait pas mal de faire régner l’ordre dans le supermarché. Yannick l’accusa d’être complice d’une voleuse. Ce qu’il ne put prouver, mais l’affaire remonta jusqu’au Directeur-adjoint. Ce salopard de planqué, c’est ainsi que Yannick désignait tous ceux qui n’étaient pas dans la sécurité, ce salopard de planqué refusa le licenciement du vigile en prétextant que cela faisait plus de vingt ans que le vigile travaillait là, sans problème, et que dans quatre mois, il partait à la retraite. C’est peu dire que Yannick et son compère, le chef de la Sécurité, avait une dent contre Eric, le Directeur-adjoint.