Le Guézète prenait en photo le marchand de fruits et légumes. Et vas-y que je prenne sous cet angle, et vas-y que je prenne sous l’autre angle. Enfin, il avait fini.
- Ah, Oda, coment qu’c’est ?
- Ça va. Et toi ?
- J’te présente un futur retraité !
- Oh ! Vous nous quittez ? (regretta notre maman).
Depuis quelques semaines le Totol la serinait avec « son prochain départ en retraite ». Mais, avec les problèmes de notre papa, cela lui était sorti de la tête.
- Eh oui. C’est mon dernier jour. La semaine prochaine, vous aurez à faire avec mon fils.
Notre maman commanda des courgettes, des aubergines, des carottes. Pour la dernière fois (?), ma sœur et moi eûmes le droit de peser les légumes, Le marchand fit l’addition et rajouta un chou-fleur, des pommes de terre et six bananes.
- C’est mon cadeau de départ et mon soutien à la grève de votre mari.
- Et à moi, te m’donnes rien ?
- T’inquiètes Mélie, je t’ai préparé une surprise.
- J’vâs faire grève moi aussi pour avoir des légumes (plaisanta le Guézète).
L’aurait mieux fait de se taire.
- Dis-donc le Guézète, au lieu de te foutre de not’ gueûle, te f’rais mieux d’écrire un article pour parler d’la grève (Le visage du Guézète se figea brusquement. Comme il ne disait mot) Alors, quand t’écris un article sur nos hommes ?
Le Guézète bredouilla quelques explications, surtout à notre maman. Il avait téléphoné au Mièsse pour avoir sa version des faits. Il était tombé sur le gendre qui l’avait menacé des pires ennuis s’il publiait un seul mot sur la grève. Une heure plus tard, le premier adjoint au Maire débarquait dans son salon de coiffure pour lui dire de ne rien écrire. Bref, le Mièsse régnait sur la région comme un seigneur…