La traditionnelle cérémonie du lever s’était, ma foi, fort bien déroulée. Nous avions fait notre « coucou » à Fanny, avalé notre petit déjeuner.
- Et maintenant, débarbouillage ! (décréta notre maman).
- Non, j’ai froid ! (grognai-je. Bon, nous étions en août…).
- Ça fait deux jours que t’es pas lavé. J’vâs te décrasser la peau avec la brosse de chiendent !
- J’veux pas !
- T’vâs voir le Peût’ôme ! Si t’laves pas, va t’mett’ dans son sac et t’emmener dans sa lessiveuse.
Notre maman leva la main comme si elle allait me coller une baffe. La menace me convainquit. Elle ouvrit le cagibi et feûgna un bon moment. Elle en sortit la brosse de chiendent et l’agita sous mon nez. Un bond me propulsa en arrière : « Pas ça ! ». Elle éclata de rire et rangea sa vinrats de brosse. Les balais et autres Océdars ne l’intéressèrent guère. Elle ne prêta pas plus d’attention à ses verrines remplies de confiture ou de légumes. Et encore moins à celles qui étaient vides.
Elle sortit la grande lessiveuse. Coula de l’eau dans la grosse cocotte qu’elle plaça sur la gazinière. L’eau chauffa. Enfin, pas trop, vu qu’elle ferma le gaz rapidement. Economies, économies… à nos dépends. La lessiveuse prit place sur la pierre à eau. L’eau tiède transvidée dedans ; hopla ! Un coup de lavète par ci, un coup de lavète par là. Et, vas-y que je frotte.
Voilà, j’étais propre comme un sou neuf. Et, maintenant, au tour de ma sœur. Pour elle, se laver était un jeu. Elle tapait dans l’eau pour provoquer des vagues et les… hauts-cris de notre maman.