Une paire de semaines… Nous avions fait le marché en compagnie de notre mémère. Traditionnelle escale, le passage chez la Dédée pour acheter le pain. Aussi traditionnelle, la distribution des bonbons. Maintenant, j’avais droit aux carambars. Bien sûr, ma sœur raconta qu’elle avait fait la marchande chez le Totol.
- B’jour Berthe, b’jour Oda.
Le Coco remontait de son fournil. Ma sœur laissa le crachoir aux grandes personnes. De quoi parlaient-elles ? Je n’en sais trop rien, nous (ma sœur et moi) étions affairés à déguster nos bonbons. Ah si, elles parlaient de toutes ces supérettes qui s’étaient ouvertes depuis l’après-guerre. Entra un jeune homme : « Messieurs-dames ». Ce fut à peine si on lui répondit. Et vas-y que je jacasse.
- T’sais Berthe, dans un sens, on est bien content d’prendre notre retraite.
- Dans quatre ou cinq ans (compléta le Coco).
Le jeune homme, plutôt bien propre avec son costume-cravate sombre, un chapeau sur la tête, patientait en chantonnant. Sa mélodie était à peine audible surtout pour notre maman et ses interlocuteurs tellement ils étaient pris par leur discussion.
- R’garde les Coop. Te fais tes achats chez eux, ils te donnent des timbres. Quand t’as remplie la page, t’as droit à un cadeau.
- J’suis jamais allé chez eux (répondit notre maman).
- Et les Duby vont ouvrir une nouvelle boulangerie avec l’alimentation. C’est ta copine, nème Oda ?
Le jeune homme, en plus de fredonner, sautillait sur place. Sans doute voulait-il attirer l’attention sur lui. En vain.
- J’l’ai vu sur le marché (répondit notre maman) Elle m’a dit que son magasin serait aussi grand que la SANAL. Et, ils feront de tout, même de la charcuterie sous vide. J’aimerais pas manger ça.
- Et le jeune homme (fit le Coco) i veut peut-être quèque chose ? (Le jeune homme commanda un pain) T’sais Oda, is vendent ça depuis longtemps aux Spar, aux Ecos, aux Coop… Tiens, la Dédée, donne voir un pain au jeune homme.